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Lutte contre la corruption: blùme pour la Suisse 

03.07.2023 05:56 – Balz Oertli

Le Groupe d’Etats contre la Corruption (GRECO) critique une fois de plus la Suisse: les parlementaires devraient enfin dĂ©clarer combien ils ou elles gagnent avec leurs revenus annexes.

Le dernier rapport du Groupe d’Etats contre la Corruption (GRECO) n’a fait l’objet que d’un bref article dans les mĂ©dias. Mais l’annonce est de taille – dans un supplĂ©ment au deuxiĂšme rapport de conformitĂ©, le groupe d’Etats parvient Ă  un jugement accablant: il ne constate aucun progrĂšs de la Suisse, qui n’a toujours pas suffisamment mis en Ɠuvre la majoritĂ© des recommandations visant Ă  prĂ©venir la corruption. Le GRECO est une institution du Conseil de l’Europe qui regroupe 50 Etats membres. Il surveille le respect des normes anticorruption du Conseil de l’Europe et examine rĂ©guliĂšrement la rĂ©silience de ses membres face Ă  la corruption. En 2017, le GRECO a publiĂ© un rapport d’Ă©valuation portant sur la «PrĂ©vention de la corruption des membres des parlements, des tribunaux et des procureurs» en Suisse.

Seules 5 recommandations sur 12 mises en Ɠuvre. Avec le supplĂ©ment qui vient d’ĂȘtre publiĂ©, le GRECO a vĂ©rifiĂ© pour la troisiĂšme fois dans quelle mesure la Suisse a mis en Ɠuvre les douze recommandations de l’Ă©valuation. Six ans plus tard, la Suisse ne respecte toujours que cinq de ces recommandations, en tout ou en partie. Pour le reste, il faut agir, critique le GRECO. En ce qui concerne le Conseil national et le Conseil des Etats, il ne voit pas de changements importants. Il n’existe pas de service de conseil dĂ©diĂ© spĂ©cifiquement aux questions d’intĂ©gritĂ©, et les parlementaires ne reçoivent pas de formation sur ce thĂšme. Cela pose problĂšme, car le rapport d’Ă©valuation de 2017 indiquait dĂ©jĂ  que «les parlementaires n’Ă©taient pas trĂšs sensibilisĂ©es aux questions Ă©thiques».

Toujours pas de transparence sur les indemnitĂ©s. Les explications relatives Ă  la recommandation IV - Transparence des rĂ©munĂ©rations des activitĂ©s des parlementaires - sont intĂ©ressantes. La seule nouveautĂ© depuis le dernier examen est que les Ă©lus Ă  l’AssemblĂ©e fĂ©dĂ©rale sont rĂ©guliĂšrement appelĂ©s Ă  mettre Ă  jour leurs dĂ©clarations d’intĂ©rĂȘts. Mais le GRECO dĂ©plore que les donnĂ©es de cette dĂ©claration ne soient pas vĂ©rifiĂ©es.

La critique la plus importante du GRECO. En effet, les parlementaires des deux chambres ne sont toujours pas tenus d’indiquer combien ils ou elles gagnent dans le cadre de leurs activitĂ©s extra-professionnelles. C’est une omission que Lobbywatch critique depuis longtemps. «Lobbywatch demande depuis des annĂ©es que les parlementaires rendent public le montant de leurs indemnitĂ©s pour des raisons de transparence», explique son co-prĂ©sident, Otto Hostettler. Actuellement, ils ou elles sont uniquement tenus d’indiquer si leurs activitĂ©s sont rĂ©munĂ©rĂ©es ou bĂ©nĂ©voles. Hostettler ajoute: «Lors de la derniĂšre enquĂȘte de Lobbywatch, plus de la moitiĂ© des nouveaux parlementaires ont nĂ©anmoins rĂ©vĂ©lĂ© leurs revenus.» En 2020, Lobbywatch a Ă©crit Ă  tous les parlementaires nouvellement Ă©lus pour qu’ils ou elles rendent volontairement publics leurs revenus annexes. 46 des 79 nouvelles Ă©lues et nouveaux Ă©lus ont rĂ©pondu Ă  cette demande. Mais comme le souligne Ă©galement le GRECO dans son Ă©valuation, un contrĂŽle par la sociĂ©tĂ© civile ne suffit pas Ă  lui seul. Un parlement doit crĂ©er son propre systĂšme de contrĂŽle.

Des pas positifs pour les juges et le financement des partis politiques. Le GRECO estime que les tribunaux vont dans la bonne direction. Il salue entre autres les efforts du Tribunal fĂ©dĂ©ral des brevets et du Tribunal administratif fĂ©dĂ©ral pour s’imposer un code de conduite. Mais il dĂ©nonce en mĂȘme temps le fait que les contributions d’élu-es et les dons aux partis politiques des juges restent autorisĂ©s. Contrairement aux rapports prĂ©cĂ©dents, le GRECO ne mentionne que briĂšvement la transparence du financement des partis et des campagnes. Le GRECO avait critiquĂ© ce point pendant des annĂ©es. Avec la mise en Ɠuvre de l’ordonnance sur la transparence du financement de la vie politique, les candidates et candidats aux Ă©lections nationales cet automne devront pour la premiĂšre fois rendre leurs finances (partiellement) publiques. L’avenir rĂ©vĂ©lera si les rĂšgles adoptĂ©es crĂ©ent suffisamment de transparence dans le financement politique pour qu’elles soient mentionnĂ©es positivement dans le prochain rapport du GRECO.