21.01.2020 08:36 â Thomas Angeli
Beat Rieder, conseiller aux Ătats valaisan PDC, veut interdire aux membres de commissions parlementaires dâaccepter des mandats rĂ©munĂ©rĂ©s sâil y a conflits dâintĂ©rĂȘts. Son initiative parlementaire ne sĂ©duit pas lâensemble de son parti.
Entretien : Thomas Angeli
Monsieur Rieder, votre initiative demande que les parlementaires ne puissent plus accepter de mandats rĂ©munĂ©rĂ©s pour une organisation concernĂ©e par un projet lĂ©gislatif sur lequel ils planchent en commission. Souhaitez-vous devenir membre dâhonneur de Lobbywatch ?
Beat Rieder : J'ai déjà suffisamment de mandats de ce type. Je dois décliner votre offre.
Pourquoi avez-vous déposé une telle initiative parlementaire ?
Il est Ă©vident que le lobbying fait partie intĂ©grante de la politique. Toutefois, les limites ne cessent dâĂȘtre dĂ©passĂ©es. Dans un systĂšme de dĂ©mocratie directe, cela nâest pas acceptable. Il est relativement difficile de dĂ©finir ces limites si vous voulez Ă la fois maintenir un Parlement de milice et prĂ©venir les conflits d'intĂ©rĂȘts. Mais commençons oĂč cela semble raisonnable. Un exemple : un parlementaire n'ayant jamais eu de liens avec la politique de santĂ© siĂšge Ă la Commission de la santĂ© publique. Quelques mois plus tard, il obtient un mandat auprĂšs dâune assurance maladie lui rapportant 120 000 francs par an. Il y a un problĂšmeâŠ
Est-ce un exemple proche de la réalité ?
Il sâagit dâune situation purement hypothĂ©tique, dans laquelle le conflit entre le mandat politique et les intĂ©rĂȘts commerciaux me paraĂźt Ă©vident. Un parlementaire a, dâune part, un mandat rĂ©munĂ©rĂ© qui lâoblige Ă reprĂ©senter les intĂ©rĂȘts de l'assurance maladie, et d'autre part, il est un politicien de la santĂ© censĂ© sâengager pour le bien commun. Des cas aussi flagrants doivent ĂȘtre interdits par la loi. Mon initiative permet Ă un parlementaire dâexercer un tel mandat sâil ne siĂšge pas Ă la commission du mĂȘme domaine de compĂ©tence. Elle ne comprend pas toutes les activitĂ©s, excluant les mandats exercĂ©s avant de siĂ©ger Ă la commission concernĂ©e, ceux rapportant un revenu de minime importance et ceux qui entrent dans le cadre de lâactivitĂ© professionnelle principale du parlementaire.
Votre texte a-t-il été accueilli favorablement par votre parti, le PDC ?
Oui, bien sĂ»r, tout le monde est trĂšs enthousiaste (rires). En fait, non. Il ne sâagit pas dâune initiative du parti. Mon objectif est de renforcer la crĂ©dibilitĂ© du Parlement et de la politique en Suisse. Je suis prĂȘt Ă©galement Ă discuter d'une meilleure rĂ©munĂ©ration du travail parlementaire, de sorte qu'un Ă©lu nâait pas Ă accepter nâimporte quel mandat pour complĂ©ter ses revenus. C'est un Ă©lĂ©ment crucial. Si les Ă©lus miliciens renoncent Ă ces mandats rĂ©munĂ©rĂ©s, leurs revenus diminuent nettement. Cela est Ă Ă©viter. Sinon, le systĂšme politique se retrouvera dĂ©stabilisĂ©.
Cela signifie-t-il que les parlementaires devraient ĂȘtre mieux rĂ©munĂ©rĂ©s pour leur travail ?
Oui. Je souhaite que seuls les frais et nuitĂ©es effectifs soient remboursĂ©s. La contribution forfaitaire nâa pas lieu dâĂȘtre. En revanche, nous devons parler de l'indemnitĂ© journaliĂšre et nous demander si elle est suffisante pour accomplir le travail parlementaire tel quâattendu par les citoyens. Le systĂšme actuel ne fonctionne pas.
Beat Rieder, 56 ans, est avocat et notaire. Il reprĂ©sente, depuis 2015, le canton du Valais au Conseil des Ătats sous la banniĂšre du PDC. La Commission des institutions du Conseil des Ătats a approuvĂ© lâinitiative parlementaire de M. Rieder par sept voix contre deux. Son homologue du Conseil national doit encore se prononcer.
AprĂšs le Conseil des Ătats, la Commission des institutions politiques du Conseil national (CIP-N) a Ă©galement approuvĂ© l'initiative parlementaire, par 15 voix contre 6. La CIP du Conseil des Ătats est ainsi mandatĂ© pour prĂ©parer les amendements nĂ©cessaires au droit parlementaire.