29.01.2018 08:34 â Thomas Angeli
La Commission des institutions politiques (CIP) du Conseil aux Etats montre beaucoup de volonté. Elle milite pour une non-transparence. Elle ne veut pas de registres des lobbyistes et propose uniquement une pseudo solution alibi.
Parfois, on aimerait plutĂŽt ne pas avoir raison. «Une joie prĂ©maturĂ©e», Ă©crivait Lobbywatch en mars 2016, quand le Conseil aux Etats avait pris en compte lâinitiative de Didier Berberat (PS/NE). Le Conseil laissait entendre quâil laissait une voie libre pour la crĂ©ation dâun registre des lobbyistes au Palais FĂ©dĂ©ral. Nous imaginions que le test de rĂ©sistance de cette proposition serait lâĂ©tape des dĂ©bats en Commission des institutions politiques. MĂȘme lĂ , le texte passait sans trop dâoppositions.
Etrangement, la Commission de la chambre haute se comportera ensuite comme si elle devait prĂ©parer un nouveau projet de loi. Elle tenait Ă couler lentement et silencieusement les revendications du Conseiller aux Etats Berberat. Tout cela parce que la tenue et la mise Ă jour dâun tel registre serait trop compliquĂ©e et pour reprendre les mots de lâancien prĂ©sident de la CIP, Peter Föhn (UDC/SZ) : «cela nâapporterait aucune valeur ajoutĂ©e». Or, le Conseil aux Etats maintenant sa position, la Commission doit imaginer un projet de loi - mĂȘme contre sa volontĂ© - projet de loi qui est enfin disponible.
La proposition est dĂ©sillusionnĂ©e : la CIP suggĂšre de modifier le systĂšme actuel, visiblement juste ce quâil faut pour ne pas ĂȘtre accusĂ©e dâavoir reniĂ© sa mission de lĂ©gislateur.
Le systĂšme dâattributions des badges dâinvitĂ©s actuel - celui qui permet actuellement Ă chaque parlementaire dâaccorder deux accĂšs Ă la salle des pas perdus - doit ĂȘtre modifiĂ© au minimum. Comme nouveautĂ©, la Commission propose que chaque parlementaire complĂšte lâinscription de son invitĂ© par un lien dâintĂ©rĂȘt. Un deuxiĂšme badge pouvant ensuite ĂȘtre accordĂ© Ă un membre de la famille ou alors Ă un collaborateur personnel. Ce qui revient - osons le dire - Ă une plaisanterie. Dans la salle des pas perdus, vous trouvez dĂ©jĂ des lobbyistes reconnus munis dâun badge Ă lâintitulĂ© collaborateur personnel ou encore plus simplement et sobrement invitĂ©.
Citons parmi la ribambelle de noms, Thomas KĂ€hr, responsable des communications institutionnelles de la BĂąloise Assurance et collaborateur personnel dâAlex Kuprecht (UDC/SZ). Ou encore Rudolf Horber, directeur de Swiss Label et collaborateur personnel de Sylvia FlĂŒckiger-BĂ€ni (UDC/AG). Une rĂ©glementation qui oblige de telles inscriptions verrait simplement exploser le nombre de collaborateurs personnel. Câest ainsi que la transparence entraĂźnerait simplement de la non-transparence.
Les lobbyistes devraient aussi - selon la nouvelle proposition - indiquer leur mandataire tout comme «annoncer les mandats pour lesquels ils se trouvent dans les couloirs du Palais». Un registre avec de telles donnĂ©es devrait ĂȘtre logiquement public. Quels reprĂ©sentants dâintĂ©rĂȘts accĂšdent au Parlement est aussi dĂ©terminĂ© par le systĂšme des invitĂ©s, qui repose dans les mains des parlementaires. Or, dâun registre central compilant les donnĂ©es, la Commission ne veut rien savoir.
Un dernier point noir devrait aussi rĂ©sister Ă la proposition : le nom des visiteurs. Des personnes peuvent accĂ©der aux couloirs du Palais avec une invitation Ă la journĂ©e. Un tel registre demeure encore et toujours non accessible au public. Lors des derniĂšres sessions, des centaines de personnes inconnues peuvent arriver au Palais Ă travers les zones et registres non publiĂ©s. Pas une personne ne contrĂŽle ces domaines, encore moins quels sont les intĂ©rĂȘts de ces visiteurs journaliers dans la salle des pas perdus.
Pour Lobbywatch, cela devient clair. La proposition de la CIP est un exercice alibi et virevolte autour du concept de transparence pour arriver Ă produire en rĂ©alitĂ© tout le contraire. Les deux chambres de lâAssemblĂ©e fĂ©dĂ©rale ne parviendraient pas Ă mettre sur pied un registre efficient des lobbyistes. Et faire tout comme lâUnion EuropĂ©enne, se voiler la face.